Les volets bleus
Publié le 21 Mai 2013
J'ai fermé fort les yeux, mais ça ne suffisait pas.
J'ai fermé les volets, et mon coeur aussi. La lumière ne peut plus entrer.
Tout ira bien, ne t'inquiète pas. Plus personne ne peut venir. Tu peux te coucher maintenant et dormir à l'infini.
Il fait sombre mais je n'ai pas peur. Je ne crains plus rien, je suis déjà en prison. La maison est bien close et n'accueillera plus la lumière. J'ai gardé la clef bien cachée.
Un jour, j'ai même croisé les mains et je suis tombée à genoux. Terrassée par la douleur ? pour prier ? en vain. Alors je me suis relevée et j'ai gardé les mains fermées.
Pourtant, avec les mains entravées, derrière les volets fermés, j'ai pitoyablement essayé d'entamer la danse de la liberté.
Elle est difficile celle là, je sais, je sais...
Je suis bien là, dans le noir. Je ne veux pas savoir qui n'est plus là. Je crie en silence, c'est épuisant, mais je crie longtemps. Personne n'entend. C'est bien.
Les volets sont toujours fermés et mes mains restent liées.
J'ai donné mes larmes dans les ténèbres, j'ai inondé mon lit, j'ai dévasté mon coeur et je me suis contentée d'appeler mes chats près de moi.
Ne crains rien, personne ne te forcera à sourire si ce n'est toi même.
Que la vie m'emporte ailleurs. Il fait noir là bas aussi, je sais que je peux y aller.
Dans la petite maison, les volets bleus sont toujours fermés
Personne ne verra ta détresse, reste bien cachée sous ta couette.
Un jour quelqu'un a ouvert les volets. J'ai même cru que j'allais pouvoir enfin les laisser comme ça.
Tu t'es trompée, mais ce n'est pas grave, tu restes encore debout. Dans le noir, mais debout.
J'ai juste refermé les volets de la petite maison et j'ai gardé la clef bien cachée.
J'ai mal à mon âme, j'ai mal à la vie. Mon corps s'effondre, il me trahit et je lui en veux.
Je t'ai vue, tu as prié, supplié, invoqué, jeûné, essayé de te livrer comme pour te libérer. Tu as la force pour continuer ?
Pour continuer ? j'ai laissé la petite maison fermée et je suis partie. J'ai marché longtemps. J'ai vécu quelque chose qui ressemble à la vie, en tout cas j'y ai cru, un instant. J'ai même souri, trop et j'ai parlé, beaucoup, pour pouvoir tout cacher.
J'ai essayé de faire entrer la lumière, mais j'ai oublié comment il faut faire. J'ai le coeur en panne.
Oui je sais, il est en miettes, il ne fonctionne plus et ça te fait vraiment peur.
Je reviens dans la maison aux volets clos. J'ai voulu perdre la clef pour être sûre de ne pas la retrouver.
Regarde derrière toi, n'oublie pas que les traces de pas ne sont pas les tiennes, mais celles de Celui qui t'a portée quand tu es tombée.
Les volets bleus de la petite maison sont bien fermés. J'ai jeté la clef. Je ferme fort les yeux mais ça ne suffit pas...